Journal officiel du Sénégal
LOI n° 2012-25 du 28 Décembre 2012 autorisant le Président de la République à ratifier l'Accord entre le Gouvernement de la République du Sénégal et l'Union africaine sur la création de Chambres africaines extraordinaires au sein des juridictions sénégalaises
EXPOSE DES MOTIFS
Soucieux d'assumer pleinement la constance dont il a fait montre depuis son accession à l'indépendance en ce qui concerne le respect de ses engagements internationaux, le Sénégal a entrepris d'organiser le procès relatif aux crimes et violations graves du droit international commis sur le territoire tchadien dans la période du 7 juin 1982 au 1er décembre 1990.
L'obligation pour notre pays de poursuivre et de juger le ou les responsables des atteintes au droit international ci-dessus évoquées, découle de l'article 7 de la Convention des Nations Unies du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels inhumains et dégradants, ratifiée par le Sénégal, le 21 août 1986. Elle a été rappelée par les Résolutions Doc Assembly/AU/3VID et Doc Assembly/AU/Déc.40 (XVIII), adoptées par la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement de l'Union Africaine, respectivement le 2 juillet 2006 à Banjul et le 31 janvier 2012 à Addis-Abéba.
Pour réunir les conditions idoines relatives à l'organisation du procès, et tenant compte de la décision de la Cour de Justice de la CEDEAO du 18 novembre 2010 à ce sujet, le Gouvernement de la République du Sénégal et l'Union Africaine ont signé à Dakar, le 22 août 2012, un Accord portant sur la création de chambres africaines extraordinaires au sein des juridictions sénégalaises.
Cet instrument juridique devrait permettre à notre pays d'honorer concrètement ses engagements internationaux en facilitant la poursuite des auteurs présumés des violations précitées dans le cadre d'un procès juste et équitable prenant dûment en compte les préoccupations des victimes dans le respect strict des droits de la défense, en conformité avec les prescriptions internationales pertinentes.
Ainsi le Gouvernement s'engage, dans le cadre de cet Accord, à adopter les mesures législatives, réglementaires et administratives nécessaires en vue de mettre en place les institutions juridictionnelles précitées.
L'Accord prévoit, en outre, des dispositions relatives à la protection des juges, des conseils, des témoins et des experts tout au long du déroulement du procès.
Le texte entre provisoirement en application à la date de sa signature et, définitivement en vigueur après sa ratification par le Gouvernement du Sénégal. Il prend fin de plein droit une fois que les décisions auront été définitivement rendues par les chambres africaines extraordinaires.
S'agissant des dispositions liées à l'organisation, au fonctionnement, à la compétence et aux règles de procédure, entres autres questions pratiques, elles sont prévues dans l'annexe à l'accord intitulé « Statut des chambres africaines extraordinaires au sein des juridictions sénégalaises pour la poursuite des crimes internationaux commis au Tchad durant la période du 7 juin 1982 au 1er décembre 1990 ».
Abdoul MBAYE.
ACCORD ENTRE LE GOUVERNEMENT
DE LA REPUBLIQUE DU SENEGAL
ET L'UNION AFRICAINE
SUR LA CREATION DE CHAMBRES
AFRICAINES EXTRAORDINAIRES AU SEIN DES JURIDICTIONS SENEGALAISES
Préambule
Rappelant la Décision Assembly/AU/Dec.401 (XVIII) adoptée le 31 janvier 2012, par la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union africaine demandant à la Commission de l'Union africaine et au Gouvernement du Sénégal d'examiner les modalités pratiques ainsi que les implications juridiques et financières, pour la poursuite des crimes internationaux commis sur le territoire Tchadien au cours de la période du 7 juin 1982 au 1er décembre 1990 ;
Rappelant la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, adoptée à New York le 10 décembre 1984 et ratifiée par le Sénégal le 21 août 1986 ;
Rappelant l'Arrêt ECW/CCJ/JUD/6/10 du 18 novembre 2010 de la Cour de Justice de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) ;
Rappelant l'Arrêt du 20 juillet 2012 de la Cour internationale de justice sur les questions concernant l'obligation de poursuivre ou d'extrader (Belgique c. Sénégal) ;
Attendu que l'union africaine représentée par la Commission de l'Union africaine (ci-après dénommée la « Commission ») et le Gouvernement de la
République du Sénégal (ci-après dénommé le« Gouvernement ») ont mené des négociations en vue de la création de Chambres africaines extraordinaires au sein des juridictions sénégalaises pour la poursuite des crimes internationaux commis au Tchad du 7 juin 1982 au 1er décembre 1990 (ci-après dénommées « les Chambres africaines extraordinaires »).
Le Gouvernement de la République du Sénégal et l'Union africaine sont convenus de ce qui suit :
Art. premier — Création
1. Le Gouvernement et la Commission conviennent de créer au sein des juridictions sénégalaises les Chambres africaines extraordinaires chargées de poursuivre le ou les principaux responsables des crimes et violations grave du droit international, de la coutume internationale, et des conventions internationales ratifiées par le Tchad et le Sénégal, commis sur le territoire tchadien du 7 juin 1982 au 1er décembre 1990.
2. Dans le cadre de la mise en œuvre de l'alinéa 1 du présent article, le Gouvernement s'engage, à adopter, s'il y a lieu, dans les meilleurs délais, les mesures législatives, règlementaires et administratives en vue de créer les Chambres africaines extraordinaires au sein du système judicaire sénégalais.
3. Le Gouvernement et la Commission s'engage à adopter une feuille de route avec un calendrier précis pour la mise en place des Chambres extraordinaires et le démarrage des poursuites.
4. De caractère international, les Chambres africaines extraordinaires appliquent leur Statut , le droit pénal international, le Code pénal et le Code de procédure pénale sénégalais et les autres lois sénégalaises pertinentes.
5. Le Statut des Chambres africaines extraordinaires figure en annexe au présent Accord dont il fait partie intégrante.
Art. 2 — Organisation.
La composition et les règles de fonctionnement des Chambres africaines extraordinaires sont déterminées par le Statut des Chambres africaines extraordinaires et les lois sénégalaises.
Art. 3 — - Budget.
1. La mise en place et le fonctionnement des Chambres africaines extraordinaires sont financés par le budget approuvé par la Table ronde du 24 novembre 2010.
2. Des ressources financières supplémentaires peuvent être mobilisées en cas de besoin.
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