Journal officiel du Sénégal

Décret n° 2013-246 du 11 Février 2013 portant approbation du Plan d'Aménagement de la Pêcherie de Crevettes Profondes

RAPPORT DE PRESENTATION

Conscient des potentialités que recèle le secteur des pêches et la contribution qu'il pourrait apporter, entre autres, à la création d'emplois, à l'équilibre de la balance des paiements et à l'alimentation des populations, l'Etat du Sénégal a, depuis les années soixante, consenti d'énormes efforts pour le développement de la pêche.

Cependant, l'absence d'un cadre institutionnel incitant à une exploitation durable de la ressource a fait que l'ensemble de ces interventions de l'Etat, aussi logiques soient-elles, ont fini par avoir des résultats très loin de ceux escomptés. En effet, le cadre institutionnel actuel caractérisé par une régulation incontrôlée de l'accès aux ressources a encouragé une augmentation rapide et incontrôlée de l'effort de pêche appliqué sur la ressource.

La conséquence est que le secteur des pêches sénégalais fait face aujourd'hui à une crise environnementale et socio-économique sans précédent qui menace la survie des communautés de pêche, l'approvisionnement en produits halieutiques de qualité des populations ainsi que les industries de transformation des pêches.

Pour inverser cette situation, une démarche de rupture par des réformes courageuses et urgentes s'impose afin que le secteur de la pêche reprenne sa première place en termes de recettes d'exportation et contribue de manière pérenne et significative au développement économique et social du pays, à travers les orientations qui lui sont assignées dans le Document de Politique sectorielle des Pêches et de l'Aquaculture.

C'est ainsi qu'un premier chantier a été ouvert par le Ministère de l'Economie maritime en 2008 pour l'élaboration d'un plan d'aménagement de la pêcherie de crevettes profondes.

La mise en ouvre du plan prévoit un partenariat public-privé. Ainsi, l'Etat accorde une concession d'exploitation exclusive à une Organisation de Gestion de la Pêche (OGP) sur la base d'un cahier des charges en contrepartie d'un paiement d'une redevance annuelle.

La pêcherie sera gérée par un système de Quota Individuel Transférable. Ce système de gestion amène les sociétés d'armement à avoir un comportement rationnel qui permet de générer une rente potentielle de cinq milliards de CFA par an. A titre de comparaison, l'Etat a perçu en 2010 de cette pêcherie, au titre des redevances de licences de pêche, 200 millions de F CFA.

La rente ainsi générée par la ressource sera partagée à 50% pour l'OGP et 50% pour l'Etat soit une recette potentielle pour l'Etat d'environ 2,5 milliards de F CFA par an.

Abdou MBAYE

PLAN D'AMENAGEMENT DE LA PECHERIE DE CREVETTES PROFONDES

(Parapenaeus Longirostris et Aristeus varidens)

AVANT-PROPOS

Conscient des potentialités que recèlent le secteur des pêches et la contribution qu'il pourrait apporter à la création d'emplois, à l'équilibre de la balance des paiements et à l'alimentation des populations, l'Etat du Sénégal a depuis les années soixante consenti d'énormes efforts pour le développement de la pêche par la construction d'infrastructures de débarquement, de transformation et de conservation, la subvention du carburant et des équipements de pêche, la mise en place de lignes de crédit, le renforcement des capacités techniques des acteurs de la pêche, la mise en place d'un cadre législatif et réglementaire de la pêche.

Mais l'absence d'un cadre institutionnel incitant à une exploitation durable de la ressource a fait que l'ensemble de ces interventions de l'Etat, aussi logiques soient-elles prises individuellement, ont fini par avoir des résultats très loin de ceux espérés car dans le cadre institutionnel actuel, elles ont participé à encourager une augmentation rapide et incontrôlée de l'effort de pêche appliqué sur la ressource.

La conséquence est que le secteur des pêches sénégalais fait face aujourd'hui à une crise environnementale et socio-économique sans précédent qui menace la survie des communautés de pêche, l'approvisionnement en produits halieutiques de qualité des populations ainsi que les industries de transformation des pêches. En fait, les ressources halieutiques n'apportent pas à l'économie sénégalaise l'appui à la croissance dont elles sont capables.

Pour inverser cette situation, une démarche de rupture, des réformes courageuses et urgentes s'imposent afin que le secteur de la pêche conserve sa première place en termes de recette d'exportation et contribue de manière durable et significative à la création de richesse et à la lutte contre la pauvreté.

Cette volonté de l'Etat de renforcer le système de gestion des pêches a été affichée dans le Code des pêches maritimes de 1998, en introduisant à l'article 10 la notion de plan d'aménagement des pêcheries.

Cette même volonté de l'Etat a été réaffirmée en 2006 dans la lettre de politique Sectorielle (LPS) des pêches et de l'Aquaculture qui fait de l'aménagement des pêcheries un des axes prioritaires.

C'est ainsi qu'un premier chantier a été ouvert par la Direction des Pêches maritimes en 2008 sur l'élaboration d'un plan d'aménagement des pêcheries démersales profondes.

Le choix a porté initialement sur ces pêcheries pour les principales raisons suivantes :

ce sont des pêcheries qui sont spécialisées et homogènes en termes de ressources, de type d'exploitation et d'espace. Ce sont donc des pêcheries qui peuvent être considérées comme des unités cohérentes à des fins d'aménagement ;

les acteurs sont peu nombreux, clairement identifiés il n'existe quasiment qu'un segment industriel dans ces pêcheries. Donc, ce sont des pêcheries indiquées pour initier un processus de concertation fortement participatif permettant l'élaboration de plan d'aménagement dans des délais courts ;

ce sont des pêcheries avec une forte valeur commerciale des espèces pêchées, dont les produits sont destinés quasi entièrement à l'exportation. Leur aménagement s'inscrit en cohérence avec les objectifs affichés dans la Stratégie de Croissance Accélérée (SCA) pour la grappe « produits de la mer et aquaculture » ;

en termes de diagnostic, les résultats scientifiques du COPACE montrent que ces ressources sont dans une phase de pleine exploitation, et qu'il ne fait pas accroître l'effort de pêche. Il y a donc maintenant un besoin de mettre en place une stratégie effective d'allocation de droit de pêche, pour pérenniser le potentiel de richesse de ces pêcheries ;

enfin, en termes de diagramme d'exploitation, les prises accessoires et les rejets en mer sont élevés dans ces pêcheries, et il est important d'améliorer la situation des rejets à des fins conservatoires et de protection de la biodiversité marine ;

Le processus d'élaboration de ces plans d'aménagement s'est voulu endogène et participatif en impliquant l'ensemble des acteurs publics et privés afin d'avoir des plans élaborés par les acteurs et pour les acteurs.

Le démarrage du processus a été précédé par une mission d'études en Mauritanie en juillet 2007. Cette mission est composée par des représentants des institutions publiques et privées appelées à jouer des fonctions importantes dans le processus d'élaboration et de mise en œuvre des plans. L'objectif de la mission était de bénéficier de l'expérience de ce pays en matière d'aménagement des pêches notamment sur les aspects institutionnels et techniques mais aussi d'identifier les perspectives de coopération scientifique et technique.

En effet, la Mauritanie avait déjà capitalisé une certaine expérience dans le domaine de l'élaboration de plans d'aménagement de pêcheries (poulpe et crevettes).

Une des retombées de cette mission est la participation d'un scientifique du Centre de Recherches Océanographiques de Dakar-Thiaroye (CRODT) aux tests de sélectivité dans la pêcherie crevettière Mauritanienne conduits par l'Institut Mauritanien de Recherches Océanographiques et des Pêches (IMROP).

Aussi un séminaire sur l'aménagement des pêches a été organisé en décembre 2008 au profit des acteurs qui sont impliqués dans les pêcheries démersales profondes afin de les préparer a bien jouer le rôle qui est le sien dans le processus d'élaboration des plans.

Parrallèlement, la procédure de recrutement du consultant devant appuyer le processus d'élaboration des plans d'aménagement sous formes de missions d'appui a été enclenchée.

Finalement, le processus a démarré en juillet 2008 avec le consultant retenu (IDDRA) et a été marquée par les principales étapes suivantes :

la mise en place de commissions techniques thématiques chargées de procéder au diagnostic approfondi et exhaustif des pêcheries démarsales profondes ;

la validation de ce diagnostic au cours d'un Groupe de Travail Scientifique et Technique qui a regroupé les membres des commissions techniques plus des techniciens et scientifiques nationaux, régionaux et sous régionaux spécialisées sur les thématiques abordées (écobiologie, exploitation, gestion, suivi, contrôle et surveillance, commercialisation et marché, écolabellisation…)

l'organisation d'un atelier sur les concessions, afin d'identifier la forme de concessions qui est appropriée pour les pêcheries qui font l'objet de ce plan d'aménagement ;

l'élaboration d'un premier draft de plan d'aménagement soumis à l'avis des institutions publiques et privées ;

la validation des mesures de gestion et de suivi, contrôle et surveillance par les institutions chargées de jouer des fonctions importantes dans la mise en œuvre du plan ;

la présentation des projets de plans d'aménagement au Conseil National Consultatif des Pêches Maritimes (CNCPM) le 10 novembre 2009.

Les projets de plan sont entrés dans la phase d'adoption politique le ...........

Le ……………….2010, le décret N°…………. portant adoption des plans d'aménagement des pêcheries démersales profondes a été pris.

RESUME DU PLAN

Ce document présente la vision stratégique d'exploitation de la ressource crevettière profonde et un plan d'aménagement pour sa réalisation en se fondant sur les documents de politique macroéconomique (DSRP II) et sectorielle des pêches (LPS) qui mettent l'accent particulièrement sur la création durable de richesse associée à la rente de la ressource.

Ainsi, l'objectif du plan est de maximiser la rente générée par l'utilisation de la ressource de crevettes profondes, en respectant les contraintes imposées par les impératifs écologiques et sociaux déterminés par le Gouvernement.

Puisque c'est le secteur privé qui crée de la richesse, le plan prévoit que l'Etat accorde une concession d'exploitation exclusive à une Organisation de Gestion de la Pêcherie (OGP) sur la base d'un cahier des charges qui définit clairement le rôle de chaque partie en contrepartie d'un paiement d'une redevance annuelle. La durée de la concession est d'un minimum de quinze (15) ans, révisable tous les cinq (05) ans en vue de la proroger de cinq (05) ans si les conditions nécessaires sont réunies.

Les possibilités de pêche annuelles sont proposées par l'OGP au Ministre qui approuve après avis de l'institution scientifique compétente.

La modélisation de la pêcherie suggère que la rente maximale tourne actuellement autour de €7,5 millions/an, avec une production de 2.300 tonnes par an et un prix 4€/kg. Toutefois ce montant changera dans l'avenir en fonction de l'évolution des paramètres-clés. Un suivi bioéconomique en routine de la pêcherie est donc essentiel.

La rente générée par la ressource sera partagée 50% pour l'Etat et 50% pour l'OGP. Toutefois, une période transitoire de deux ans (2) est prévue avant l'application de cette disposition.

Cependant, un certain nombre de préalables devraient être réunis afin que l'estimation de cette rente puisse être le plus fiable possible à savoir :

le besoin d'un observatoire économique afin de disposer d'informations fiables concernant les prix des crevettes ;

le besoin d'un modèle bioéconomique validé conjointement par le Ministre et l'OGP pour estimer la rente à partager.

Ce plan est tout à fait novateur par rapport à ce qui est d'usage jusque là dans le secteur. C'est pourquoi, il permettra certainement au Sénégal de réaliser ses deux grands objectifs économique et écologique pour la pêcherie.

En outre, il contribuera à l'augmentation de façon significative de la richesse tirée de cette ressource au bénéfice des usagers et du Sénégal.

LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS

CA Chiffre d'Affaires

CAA Capture Autorisée Annuelles

CFA Franc CFA

COPACE Comité des Pêches de l'Atlantique Centre Est

CRODT Centre de Recherches Océanogra phiques de Dakar-Thiaroye

DIC Division des Inspections et du Contrôle

DITP Direction des Industries de trans formation de la Pêche

DPSP Direction de la Protection et de la Surveillance des Pêches

DSRP Document Stratégique de Réduction de la Pauvreté

EFE Entreprise Franche d'Exportation

GAIPES Groupement des Armateurs et des Industriels de la Pêche Mari time au Sénégal

GTST Groupe de Travail Scientifique et Technique

INN Pêche Illicite, Non déclarée et Non réglementée

IUCN Union Mondiale pour la Nature

LPS Lettre de Politique Sectorielle

MSY Rendement Maximal Equilibré (de l'anglais Maximum Sustainable Yield)

MSC Marine Stewardship Council

OGP Organisation de Gestion de la Pêcherie

ONG Organisation Non Gouvernementale

PAD/DPP Port Autonome de Dakar/Division Port de pêche

PRCM Programme Régional de Conserva tion de Zone Côtière et Marine

UE Union Européenne

SCA Stratégie de Croissance Accélérée

TAC Total Admissible de Capture

VMS Système de Suivi Satellitaire (de l'anglais Vessel Monitoring System

WWF Fonds Mondial pour la Nature

ZEE Zone Economique Exclusive

INTRODUCTION

Il n'existe pas actuellement un plan stratégique axé spécifiquement sur la gestion des ressources halieutiques profondes au Sénégal. Ce document propose donc à la fois une vision stratégique pour l'exploitation de ces ressources et un plan d'aménagement pour la réalisation de cette dans le cas de la pêcherie de crevettes profondes (Parapenaeus Longirostris et Aristeus varidens)

La vision stratégique adopté ici se fonde d'abord sur les éléments macroéconomiques (notamment le Document Stratégique de Réduction de la Pauvreté (DSRP II) et la Stratégie de Croissance Accélérée (SCA) ; Grappe produits de la mer et aquaculture) qui mettent l'accent sur la création durable de richesse associée à la rente de la ressource.

Ensuite, elle se base sur une interprétation pour cette pêcherie de la Lettre de Politique Sectorielle des Pêches et de l'Aquaculture (LPS) (Ministère de l'Economie maritime, des Transports maritimes, de la Pêche et de la Pisciculture 2008). De larges concertations nationales sur la pêche et l'aquaculture organisées en l'an 2000 par le Gouvernement du Sénégal ont permis de définir six axes stratégiques majeurs pour guider la réforme du secteur de la pêche et de l'aquaculture que la LPS vise à réaliser :

i)

assurer une gestion durable de la pêche et de l'aquaculture, tout en maintenant leur viabilité économique ;

ii)

satisfaire la demande nationale en produits halieutiques ;

iii)

améliorer et moderniser les conditions d'exercice de la pêche artisanale et le l'aquaculture vivrière ;

iv)

accroître la valeur ajoutée des produits halieutiques ;

v)

développer un système durable de financement de la pêche et des activités aquacoles ;

vi)

renforcer la coopération bilatérale, sous régionale, multilatérale et internationale en matière de pêche et d'aquaculture.

Ce plan d'aménagement est concerné en particulier par les axes 1, 4 et 5. La priorité est nécessairement donnée à l'axe 1 car sans des systèmes de gestion et d'exploitation assurant la durabilité de la ressource, il serait contre productif d'essayer d'augmenter la valeur ajoutée des produits halieutiques.

L'axe 5 est concerné dans la mesure où le plan propose et développe une stratégie pour que les coûts récurrents de gestion de la pêcherie soient couverts de façon durable par les usagers de ses ressources.

On prend comme hypothèse que les stocks de crevettes profondes sont indépendants et donc la pêcherie est peu concernée par l'axe 6. Etant donné par ailleurs que la pêcherie concerne une exploitation exclusivement par des navires industriels et que les perspectives d'exploitation de ces ressources par la pêche artisanale sont inexistantes, sa gestion ne pourra pas apporter une contribution à l'axe 3.

Enfin, l'axe 2 n'est pas directement concerné par cette pêcherie, étant donné sa concentration sur les marchés à l'export. Toutefois, il est à noter que les exportations de produits halieutiques de par la richesse ainsi créée peuvent contribuer indirectement à la sécurité alimentaire du pays donc l'axe 2 semble plutôt être un sous-objectif pour cette pêcherie.

Pour la mise en œuvre de la stratégie, la LPS met en avant deux principes importants :

i)

traiter en priorité les questions relatives à la réduction des surcapacités, au contrôle de l'accès aux ressources, à la maîtrise de l'effort de pêche et au renforcement du degré de responsabilisation des pêcheurs ;

ii)

développer une politique publique visant à « placer le pêcheur au cœur de la réforme ».

Ce plan d'aménagement se fonde sur ces principes directeurs. En particulier, ces principes sont en phase avec le constat que c'est le secteur privé qui crée la richesse. Dans la pêche, le rôle du secteur public est, d'une part, de veiller à ce que les conditions institutionnelles permettent la création de cette richesse de façon durable en tenant compte des limites naturelles de la ressource et, d'autre part, d'assurer un partage équitable de cette richesse entre la Nation (en tant que propriétaire de la ressource) et les exploitants (afin de les encourager de continuer à innover et à augmenter la richesse créée).

Cette approche met le plan d'aménagement en phase non seulement avec la LPS, mais aussi avec le DSRP et la SCA, qui identifie le secteur de la pêche comme étant un secteur capable de créer de la richesse et ainsi de contribuer à la lutte contre la pauvreté.

L'approche de gestion retenue a consisté à décrire et valider la situation actuelle de la pêcherie, à évaluer l'écart entre cette situation et celle souhaitée dans les documents de politique et à tracer les moyens d'arriver à la situation souhaitée. Ce plan commence donc avec une évaluation (un diagnostic) de l'existant par rapport aux objectifs affichés par le Gouvernement pour le secteur des pêches. Ensuite, il caractérise la situation recherchée dans cette pêcherie. Enfin, il propose un cadre de gestion en vue de faire évoluer la pêcherie vers cette situation recherchée.

1. Définition de la pêcherie

La pêcherie concerne les stocks de la crevette rose profonde (Parapenaeus Longirostris) aussi appelé « gamba » et ceux de l'alistado (Aristeus Varidens) ainsi que tous les segments d'exploitation qui exploitent ces deux espèces dans la ZEE sénégalaise conformément aux dispositions du Code de la Pêche Maritime et son décret d'application.

Ces segments d'exploitation concernent :

les armements du segment de pêche industrielle qui opèrent avec une licence de pêche industrielle démersales profonde option chalutiers crevettiers ;

la fausse pêche, principalement constituée par les armements du segment de pêche industrielle qui opèrent avec une licence de pêche démersale côtière option chalutiers crevettiers et qui capturent occasionnellement des crevettes Gambas en prises accessoires.

II. Eléments de diagnostic

Le diagnostic de la pêcherie de crevette profonde a fait l'objet de plusieurs rapports concernant la gestion actuelle de la pêcherie, la bio-écologie, l'exploitation et la commercialisation. Ce diagnostic a été validé par le Groupe de Travail Scientifique et Technique (GTST) qui a eu lieu du 22 au 25 juin 2009.

Cette section présente un résumé des idées forces de ce diagnostic qui sont importantes à prendre en considération pour le plan. Le rapport du Groupe de Travail présente, lui, de plus amples détails sur le diagnostic de la pêcherie et son système de gestion.

2.1 La Bio-écologie

Le stock principal dans la pêcherie concerne la crevette rose profonde (Parapenaeus longirostris) ou « gamba ». La pêcherie exploite aussi l'Alistado (A Varidens) ainsi que le crabe profond (Geryon maritae) et divers poissons.

Un modèle de production dynamique de Schaefer (communément appelé « Biodyn ») a été développé. Ce modèle concerne uniquement la gamba, la production des autres espèces est incluse en multipliant la valeur de la production de la gamba par une facteur d'ajustement (1,38) qui représente la moyenne sur une certain période. Ce facteur peut varier et est donc à suivre.

Le modèle (et donc ce plan) prend comme hypothèse qu'il existe un stock Sénégambien dont l'exploitation est gérable de façon indépendante.

La « gamba » du Sénégal a fait l'objet de plusieurs évaluations du Comité des Pêches pour l'Atlantique Centre-Est (COPACE), en maintenant justement l'hypothèse d'un stock Sénégambien indépendant. Il ressort de ces évaluations une estimation du rendement maximal soutenu (MSY, de l'anglais « maximum sustainable yield ») de 2.447 tonnes.

Toutefois, il est très important de noter que ce potentiel (MSY) doit être pris à titre « indicatif » et comme un potentiel « moyen » car sa marge de variabilité inter-annuelle est probablement importante, du fait de la biologie de cette espèce (vie courte et recrutement variable en fonction de l'environnement). De ce constat, il est important que le plan d'aménagement prévoit un système flexible et actualisable de fixation des possibilités de capture.

2.2. Le système d'exploitation

La flotte crevettier profonde sénégalaise est composée de 17 unités dont 15 sont actuellement opérationnelles et sont en activité. Ces 15 chalutiers appartiennent à 6 armements qui sont :

HISEPEC : 5 navires ;

GOBER SENEGAL : 3 navires ;

SISPA : 3 navires ;

ASTIPECHE : 1 navire ;

OCEAN PESCA : 2 navires ;

HISPASEN : 1 navire ;

Dans tous ces armements de droit sénégalais, sont présents des partenaires espagnols, à l'exception de l'armement SISPA.

Dans l'état actuel du système d'information concernant la pêcherie, il est difficile de savoir la qualité exacte de crevettes profondes pêchées par ces chalutiers. Différentes sources de données donnent des résultats sensiblement proches mais pas exactement les mêmes concernant les débarquements de crevettes profondes.

Le tableau 1 résume les données du Centre de Recherches Océanographiques de Dakar Thiaroye (CRODT) pour la période allant de 2001 à 2007.

Année

Débarquements

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

Crevettes

profondes

1.505

2.497

3.154

2.532

2.977

2.432

2.621

Tableau 1. - Les débarquements de crevettes profondes 2001-2007 (Sources : CRODT)

Le tableau 2 présente les données du Groupement des Armateurs et des Industriels de la Pêche Maritime au Sénégal (GAIPES) débarquements en quantité et en valeur pour les années 2005-2007. Les ordres de grandeurs des chiffres de production sont similaires aux chiffres du CRODT mais pas les mêmes.

Année

2005

2006

2007

Débarquements

Quantité(tonnes)

Valeur(millions fCFA)

Quantité (tonnes)

Valeur (millions fCFA)

Quantité (tonnes)

Valeur(millions fCFA)

Crevette

profonde

3.076

8.604

2.420

6.790

2.678

3.770

Tableau 2. - Les débarquements de crevettes profondes 2005-2007 (Source GAIPES)

Le tableau 3 présente les données du Port Autonome de Dakar (PAD) concernant les débarquements de crevettes profondes effectués par les navires battant pavillons sénégalais.

Année

Débarquements

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

Quantité (tonnes)

3.780

2.864

2.933

3.070

3.202

2.949

2.596

3.126

2.977

Valeur (millions fCFA

8.046

5.528

4.866

5.448

6.131

6.918

5.347

4.051

4.218

Tableau 3. - Les débarquements de crevettes profondes au PAD des navires battant pavillon sénégalais (Sources DPP/PAD).

Le tableau 4 donne les exportations de crevettes profondes. Comme la production est exportée pratiquement à cent pour cent ces chiffres devraient être aussi un bon indicateur du niveau de production annuelle. On voit que pour l'année 2006, les exportations en quantité correspondent exactement aux chiffres de production présentés par le GAIPES. Par contre pour 2007, les exportations sont apparemment plus importantes que la production et cela que l'on prenne le chiffre du GAIPES ou celui du CRODT ou encore celui du PAD.

Année

Export

2004

2005

2006

2007

2008

Crevette

profonde (tonnes)

2.736

2.871

2.420

3.184

2.800

Tableau 4. - Les exportations de crevette profonde 2004-2008 (Source : DIC /DITP, 2008).

Ces différences plaident en faveur d'une révision du système d'information concernant la pêcherie afin de disposer d'une seule source de base de chiffres validés. Ensuite, l'utilisation de ses chiffres se fera sur la base d'un partage de l'information suivant des protocoles d'accès qui seront à définir entre les différents utilisateurs de ce système d'information.

Toutefois, il est clair que la flottille actuelle en activité est largement suffisante pour exploiter la pêcherie à son niveau de MSY.

Les chalutiers n'utilisent pas actuellement de dispositif de sélectivité ce qui fait que la pêcherie connaît un taux de rejet relativement important. Il semblerait que la structure des captures en mer soit de l'ordre (en moyenne sur l'année) de 30% de crevettes profondes et 70% de prises accessoires. La structure des débarquements par contre tourne autour de 80% de crevettes profondes et 20% de prises accessoires. Il y a donc forcément un pourcentage important de rejets en mer même si le chiffre exact peut être sujet à débat.

Les expériences sont en cours pour essayer de réduire le taux de rejet en poisson notamment via l'utilisation de différents dispositifs de sélectivité (type grille Nordmore, mailles carrées,……)

Les chalutiers sont autorisés à utiliser un maillage minimal de 40mn dans le cul du chalut.

Ceci explique, peut être, le fait que le profil des captures est actuellement orienté vers des petites tailles de crevettes (80% de la production concerne la catégorie 3B, ce qui correspond à 150 à 180 individus par kilogramme) de valeur commerciale moindre par rapport aux grandes tailles. Les catégories commerciales s'échelonnent entre 1 et 4,1 étant la catégorie 1 la plus grande qui correspond à 80 individus par kilogramme).

2.3. La commercialisation

La crevette profonde est commercialisée quasi-exclusivement sur le marché espagnol sous le terme de « gamba ». La crevette Parapenaeus longirostris bénéficie d'une très bonne image et d'un positionnement de haut de gamme sur le marché espagnol.

Le marché espagnol de la crevette est grande taille, fortement importateur puisque la production espagnole est non-significative. L'offre de crevettes sur le marché espagnol se caractérise par une grande diversité puisqu'un grand nombre d'espèces sont représentées. L'Espagne a une préférence marquée pour la crevette sauvage.

Trois articles sont des références :

la crevette d'Argentine Hymenopenaeus muelleri ;

la crevette d'élevage Penaeus vannalei ;

la crevette Parapenaeus longirostris ou gamba.

Pour les spécialistes du marché, il n'existe pas de vraie concurrence entre ces trois types de crevettes, chacune d'elles occupant un créneau assez précis en termes de tailles.

Toutefois, cette hypothèse est à confirmer par des analyses économétriques capables de faire ressortir les interdépendances qui existeraient au niveau du prix.

Côté prix, la référence est la grille de prix de la criée de Huelva sur laquelle est écoulé le gros des volumes de gamba. Le prix payé à l'armateur souffre de deux handicaps :

Il est avant tout l'expression d'un rapport de pouvoir déséquilibré entre les acheteurs espagnols et les sociétés d'armement sénégalais. Le manque de transparence que sous entend la répartition du capital de ces derniers autorise à penser que l'exercice de pouvoir au sein de ces sociétés d'armement relève en priorité des acteurs espagnols ;

Paradoxalement, les armateurs sont rétribués sur la base d'un prix moyen de leurs captures de gambas : ce prix résulte de la confrontation de cette grille de prix avec la structure des captures par tailles.

D'une façon générale, le manque de données plus précises sur l'état du marché (taille en volume et en valeur, dynamique, part de marché exacte du Sénégal, répartition de la valeur ajoutée depuis l'armateur jusqu'au consommateur final, prix de vente sur le marché des ménages…) crée un manque de lisibilité préjudiciable à la filière sénégalaise.

2.4 La valeur potentielle de la pêcherie

La rente de la ressource mesure la valeur de la ressource. Dans une pêcherie où il existe des droits de pêche transférables le prix de ces droits (soit à la vente, soit pour une location) peut être utilisé pour estimer cette rente. Actuellement de tels droits n'existent pas dans la pêcherie de crevette(s) profonde(s), et donc, des estimations doivent être faites, soit sur la base de modèles bioéconomiques, soit en utilisant des règles empiriques fondées sur l'expérience d'autres pêcheries de par le monde.

Un modèle bioéconomique a été développé pour la pêcherie de crevette profonde. Ce modèle doit être développé davantage dans l'avenir. D'après le modèle, la rente maximale est obtenue avec une production de 2.300 tonnes. Ce niveau de production est à comparer avec le MSY, estimé à 2.560 tonnes par ce modèle (sensiblement la même chose que l'estimation du COPACE précédemment citée).

A ce niveau de production et avec un prix de 64/kg, les usagers dégageront un Chiffre d'Affaires (CA) pour la Gamba uniquement de €9,2 million/an. A ce montant il faut ajouter le CA obtenu des autres espèces débarquées par la pêcherie, ce qui donne un CA total de l'ordre de €12,6 millions /an (facteur d'ajustement de 1,38 mentionné précédemment).

En rationalisant leur effort de pêche, les usagers pourraient générer une rente de la ressource de l'ordre de €7,5 millions/an avec ce niveau de production et ce prix.

Il est à noter que ce chiffre est calculé sans tenir compte des coûts de gestion de la pêcherie. Si on retient la recommandation du GTST que les coûts de gestion, selon les bonnes pratiques, ne doivent pas dépasser 5% du CA de la pêcherie, il conviendrait de retrancher autour de €630.000 de ce montant.

Pour le montant, le modèle fournit seulement une estimation de la rente potentiellement disponible d'une exploitation économiquement rationnelle de la ressource. Les méthodes empiriques d'estimation de la rente suggèrent que le montant varie en 30 et 75% du CA. Le modèle donne un résultat correspondant à 60% du CA, ce qui est dans la fourchette, mais relativement élevé.

Il faut également tenir compte de la sensibilité de l'estimation de la rente aux paramètres clés, notamment le prix de la crevette et le coût du carburant, Récemment, le prix a eu une tendance à la baisse (notamment en 2007) et le carburant a eu une tendance à la hausse, ce qui dans les deux cas réduirait l'estimation de la rente potentiellement disponible.

Mais sur un registre plus positif, il faut noter que les études d'autres pêcheries montrent que suite à la mise en place d'un système de gestion performant économiquement, les usagers arrivent presque toujours à extraire plus de valeur des débarquements autorités.

L'expérience d'autres pays montrent qu'en moyenne l'augmentation supplémentaire de la rente tourne autour de 35% de la rente initialement prévue. Bien évidemment, ce phénomène, s'il existe, améliore sensiblement le calcul de la rente. La structure des prix de la crevette profonde laisse espérer qu'une telle amélioration soit possible, mais bien sur il serait dangereux et contre-productif de la prendre en considération avant qu'elle ne se réalise.

2.5 L'évaluation de la performance actuelle de la pêcherie

La GTST conclut sur un certain nombre de constats concernant la pêcherie.

La pêcherie exploite la ressource au-delà du MSY. Cette surexploitation biologique est accompagnée par une surexploitation économique. La conséquence de cette dernière est que la pêcherie produit très peu de bénéficies pour le Sénégal.

Les bénéfices se limitent à des effets de l'exploitation elle-même, c'est-à-dire :

des exportations autour de 4 milliards de francs CFA. Le résultat net en devises est moins important car il faut également tenir compte des intrants importés (matériel de pêche, assurance, emballages, mais d'œuvre expatriée) ;

quelques 300 emploies sénégalais créés ;

une faible contribution à la croissance économique via une valeur ajoutée de l'ordre de 4 millions €/an, une partie non-négligeable de la VA totale générée (environ 50% étant destinée aux acteurs en dehors du Sénégal ;

Zéro contribution directe à la sécurité alimentaire ;

une très faible contribution au Trésor Public en raison de la très faible fiscalisation des entreprises d'armement qui bénéficient du statut d'Entreprise Franche d'exportation (EFE). La contribution aux recettes budgétaires se fait via les licences de pêches-estimée à 120 millions CFA en 2008 ( soit environ 183 000 € par an)

III. Le plan d'aménagement

Compte tenu des objectifs stratégiques fixés par le Gouvernement et compte tenu du diagnostic concernant la pêcherie, le plan d'aménagement qui suit est proposé.

3.1 Objectif

L'objectif du plan est de maximiser la rente générée par l'utilisation de la ressource de crevettes profondes, en respectant les contraintes imposées par les impératifs écologiques et sociaux déterminés par le Gouvernement.

Pour réaliser cet objectif, le plan d'aménagement doit résoudre un certain nombre de questions :

Combien peut-on pêcher afin de respecter les impératifs écologiques ?

Qui peut pêcher et dans quelles conditions afin de créer le maximum de richesse ?

Comment partager la richesse créée entre les parties prenantes ?

Le défi majeur de tout plan d'aménagement est de répondre à ces 3 questions, mais surtout à la deuxième. L'obtention d'une réponse satisfaisante dépend du cadre institutionnel. Le but du plan est de créer un cadre qui responsabilise les usagers et leur donne les incitations à exploiter la ressource pour que la valeur économique potentielle soit réalisée de façon durable.

3.1 Création d'une organisation de gestion de la pêcherie

Le Code des Pêches prévoit qu'une pêcherie sous plan d'aménagement peut être gérée, entre autres, par captures totales autorisées (TAC, de l'anglais « total allowable catch »), par quota individuel et par la mise en place de concessions d'exploitation à différents niveaux. Le plan d'aménagement pour la crevette profonde réunit différents éléments de ces trois approches.

Sera créée une Organisation de Gestion de la Pêcherie (OGP) qui réunit tous les usagers. Tout exploitant de la crevette profonde sera obligatoirement un membre de l'OGP, qui est une personne morale, domiciliée fiscalement au Sénégal.

Les membres de l'OGP sont également des personnes morales, domiciliées fiscalement au Sénégal et disposant d'au moins une licence de pêche démersale profonde option chalutiers crevettiers.

Les membres fondateurs de l'OGP sont toute société de pêche de droit sénégalais ayant débarqué en conformité avec la loi des crevettes profondes entre une période de référence allant du 1 janvier 2006 au 31 décembre 2008, et qui remplit les conditions du paragraphe précédent.

L'OGP ainsi constituée nécessitera l'approbation du Ministre afin d'entrer en fonction.

Approbation de l'OGP

Le Ministre approuvera l'OGP à condition que l'OGP satisfasse les quatre (4) conditions suivantes :

CONDITION 1 : Forme juridique de l'OGP

Les membres de l'OGP proposeront au Ministre la forme juridique de l'OGP. Le Ministre s'assure que cette forme juridique est appropriée aux fonctions de l'OGP et conforme au droit des affaires.

CONDITION 2 : Distribution initiale des parts dans l'OGP

L'OGP émettra 1.000.000 parts. Ces parts représenteront cent pour cent du TAC annuellement autorisé. Vu le MSY, tournera autour d'un maximum de 2.500 tonnes par an. La valeur précise de chaque part changera d'année en année en fonction du TAC fixé, mais sera de l'ordre de 2,5 kg d'autorisation de capture de crevette.

Le Gouvernement fera une proposition à l'OGP pour la distribution des parts entre les membres, basée sur les informations dont il dispose en utilisant la formule suivante :

Pour un actionnaire i, le nombre de parts dans l'OGP est égal à :

(Captures de i pendant la période de référence/Captures totales de la pêcherie)* 1.000.000

Les actionnaires initiaux de l'OGP peuvent :

Soit accepter à l'unanimité cette proposition

Soit faire une contre-proposition acceptée à l'unanimité

Tout membre fondateur est libre de refuser de prendre les parts ou une partie de celles-ci dont il aurait eu droit suivant la formule ci-dessus. Dans ce cas, les parts seront redistribuées aux autres membres selon une formule négociée entre les membres et adoptée à l'unanimité.

Le Ministre s'assure que les membres de l'OGP approuvent à l'unanimité la distribution initiale des parts de l'OGP.

CONDITION 3 : Protection des intérêts minoritaires

Le Ministre s'assure que l'OGP a pris des dispositions afin de protéger les intérêts des actionnaires minoritaires.

CONDITION 4 : Systèmes nécessaires pour remplir ses fonctions

Le Ministre doit disposer des garanties comme quoi l'OGP a mis en place les systèmes nécessaires pour remplir ses fonctions telles que prévues dans ce plan d'aménagement.

3.3 Mise en place d'une concession pour l'OGP

Une fois l'OGP approuvée par le Ministre, le Gouvernement accordera et garantira une concession exclusive d'exploitation d'un minimum de 15 ans à l'OGP.

L'OGP sera chargée de la gestion de la pêcherie conformément aux termes de la concession. Un cahier des charges définitif sera défini pour la concession.

Après 5 ans, le Gouvernement ordonnera une évaluation indépendante du fonctionnement de la concession. Cette évaluation, qui sera financée par le budget de gestion de la pêcherie, portera une attention particulière à l'utilisation faite par les membres de l'OGP de la richesse générée par la pêcherie pour le bien-être et le développement économique du Sénégal. Si les résultats obtenus sont satisfaisants, le Gouvernement pourra décider de prolonger la concession pour une période à déterminer.

3.4 Détermination des possibilités de pêche pour la pêcherie (TAC)

Chaque année l'OGP propose un TAC pour les deux espèces de crevettes profondes (la crevette rose profonde (Parapenaeus longirostris) et l'alistado (A. Varidens)) concernant toute la ZEE sénégalaise pour la campagne annuel de pêche. Le début et la fin de la campagne annuelle de pêche sera approuvée par le Ministre sur proposition de l'OGP.

Le Ministre évalue, sur conseil de l'organisation scientifique compétente, cette proposition de TAC et l'autorise uniquement si elle respecte le principe adopté pour protéger le stock et répondre aux impératifs écologiques énoncés dans le paragraphe suivant.

Ce principe est que les biomasses de crevettes profondes ne doivent pas se trouver en dessous du niveau correspondant au MSY et donc, la Biomasse au MSY (BMSY) est adoptée comme un point de référence limite.

Le niveau de production qui maximise la rente, estimée à 2.300 tonnes de gambas par an, devrait permettre de respecter ce principe la plupart du temps. Toutefois, les variations naturelles liées à des changements environnementaux peuvent influer sur le niveau de captures à autoriser, et il faudrait que l'organisation conseillant le Ministre prête une attention particulière à ce point.

Dans le cas où la biomasse se trouve dans une situation en dessous du BMSY, le Ministère, sur conseil de l'organisation scientifique compétente, discutera avec l'OGP afin de prendre les mesures qui s'imposent, et notamment une réduction temporaire de la production, pour rétablir la situation du stock dans une période de temps raisonnable.

Si l'organisation scientifique compétente n'est pas en mesure de fournir un conseil sur le TAC au Ministre en temps utile, un TAC de précaution sera adopté. Ce TAC, proposé par la profession sera d'un montant de 1.930 tonnes. Ce TAC de précaution sera amendé si nécessaire et rendu définitif une fois que l'organisation scientifique compétente est en mesure de conseiller le Ministre.

3.5 Détermination des possibilités de pêche individuelles

L'OGP doit disposer d'un système adéquat permettant de suivre les droits de pêche individuels. A cet effet, l'OGP tiendra à jour un registre de ses membres et le nombre de parts qu'ils détiennent. Les membres étant libres de vendre ou autrement transmettre tout ou une partie de leurs parts à un autre membre de l'OGP, il est important que l'OGP dispose de systèmes adéquats permettant le suivi des transferts.

Avant le début de chaque saison, l'OGP informera ses membres et le Ministère de leurs captures autorisées annuelles (CAA) qui seront calculées comme suit :

Les CAA du membre « i » = (Le % de parts détenu par « i ») x TAC

Par exemple, si un membre « i » détient 100.000 actions, il détient 10% du total de 1.000.000 actions. Si ensuite le TAC est fixé à 2.300 tonnes, il disposera d'un CAA individuel de 230 tonnes pêchable sur l'année.

Les membres peuvent louer tout ou partie de leur CAA aux autres membres. L'OGP tient un registre des transferts et en informe le Ministère après chaque transfert.

Les CAA peuvent être pêchées uniquement par des navires disposant d'une licence crevette profonde.

Avant de commencer une marée, tout navire doit être en possession d'une licence et une CAA. Si le navire capture des crevettes au-delà de la CAA dont il dispose, il peut régulariser sa situation en acquérant des droits de pêche à un membre de l'OGP avant de débarquer les crevettes.

L'OGP informe la DPSP des navires autorisés à pêcher la crevette profonde (c'est-à-dire disposant ET d'une licence ET de CAA) en début de saison et chaque fois qu'un changement s'opère.

3.6 Contrôle des captures

Le système actuel de licences est maintenu afin de s'assurer que la qualité des navires utilisés dans la pêcherie remplit bien les conditions imposées par les différents accords internationaux en matière de marine marchande et autres. La redevance sur cette licence est maintenue à son niveau actuel afin d'éviter la prise de licences sur une base spéculative qui pourrait compliquer le système de gestion. Les frais de licence rentrent dans les coûts des entreprises et seront donc déduits avant tout calcul de rente pour la pêcherie.

Il est interdit à tout bateau ne disposant pas d'une licence de pêche crevette profonde de débarquer de la crevette profonde.

Il est interdit à tout bateau ne disposant pas de CAA de débarquer de la crevette profonde.

Un bateau disposant d'une licence crevette profonde et de CAA est autorisé à débarquer la crevette profonde dans la limite de son CAA au moment du débarquement (prenant en considération tout droit de pêche obtenu pour les raisons de régularisation).

Les débarquements s'opèrent exclusivement au Port Autonome de Dakar PAD/DPP. Tout débarquement en dehors du PAD est interdit.

Tout transbordement est interdit.

L'OGP informe le Ministère chaque semaine des captures réalisées par ses membres.

L'OGP est responsable de vérifier que les débarquements totaux réalisés par ses membres ne dépassent pas le TAC.

Si les captures totales excédent le TAC, l'OGP doit payer une pénalité au Ministère sur chaque kilogramme de dépassement. Le montant de cette pénalité sera fixé annuellement par le Ministre.

De plus, le TAC de l'année n+1 sera diminué de l'excédent de capture réalisé dans l'année n.

Afin de s'assurer de l'équité au sein de l'OGP, celle-ci est autorisée à perdre les dispositions qui s'imposent afin de sanctionner ses membres qui sont responsables des dépassements de captures.

Vu l'importance du respect du TAC pour la durabilité, le système adopté par l'OGP sera renforcé avec les dispositions suivantes.

Tout navire installera obligatoirement un journal de pêche électronique. Il transmettra ses captures à la DPSP chaque 24 heures. Les informations précises à communiquer seront définies de temps à autre par le Ministère mais concerneront au minimum les captures faites de crevette profonde en quantité par catégorie commerciale.

Après la dernière opération de pêche et au moment où il fait route pour le débarquement, le bateau doit annoncer son intention de débarquer. Un manifeste provisoire est envoyé à la Douane à ce moment sur la base des déclarations journalières.

Au débarquement, les captures sont contrôlées par les autorités en présence de l'OGP et en utilisant des balances homologuées. Le manifeste définitif est établi.

Les données obtenues sont validées et stockées sur un serveur unique (avec un système de sauvegarde adéquat). Ensuite, les données validées sont transmises aux différents intervenants suivant besoin comme défini dans leurs fonctions officielles. La base de données pourra également être interrogée par les utilisateurs agréés suivant des protocoles définis.

3.7 Budget de gestion

La bonne gestion de la pêcherie nécessite des financements. Plusieurs fonctions entre autres, sont concernées :

le calcul du TAC annuel et des redevances (modélisation bioéconomique) ;

le contrôle des débarquements ;

le contrôle en mer ;

le système VMS ;

le journal de pêche électronique ;

le contrôle des activités de pêche qui peuvent influer sur la crevette profonde ;

l'éco certification ;

les audits de la concession ;

L'expérience d'autre pays montre bien deux choses. Premièrement, en l'absence de rigueur budgétaire ; les besoins de la gestion peuvent croître presque sans cesse et nombre sont les pays où tous les bienfaits potentiels de l'exploitation des ressources halieutiques sont consommés totalement par les frais de gestion. Bien évidement, il est important d'éviter cette situation. Deuxièmement, la meilleure pratique mondiale montre que lorsque le système de gestion fonctionne bien, les frais de gestion tournent autour de 5% du chiffre d'affaires de la pêcherie.

Pour situer la pêcherie de crevette profonde dans les meilleures pratiques mondiales ; le budget annuel consacré à la gestion sera limité à un maximum de 5% du chiffre d'affaires annuel de la pêcherie. L'objectif sera progressivement de diminuer ce montant, tout en s'assurant que le budget reste suffisant pour une bonne gestion de la pêcherie.

Pour le démarrage du plan, cette règle donne un budget initial annuel de 425 millions FCFA. Les années suivantes le budget de gestion sera calculé de l'année sera calculé sur la base du CA réalisé l'année précédente.

En principe, le budget de gestion sera financé par l'OGP. Toutefois, ce budget pourra être financé autrement lors de la période de transition sur les premières années de mise en œuvre du plan.

La fixation des priorités pour la gestion de la pêcherie et donc l'allocation du budget de gestion se fera annuellement par une commission paritaire Ministère-OGP.

3.8 Paiement de la redevance pour la Concession

Les textes juridiques et réglementaires en vigueur stipulent clairement que :

« Les ressources halieutiques des eaux sous juridiction sénégalaise constituent un patrimoine national. Le droit de pêche dans les eaux maritimes sous juridiction sénégalaise appartient à l'Etat qui peut en autoriser l'exercice par des personnes physiques ou morales de nationalité sénégalaise ou étrangère. " (Code des Pêches, Loi 98-32, Article 3)

A ce titre, l'Etat confère la concession à l'OGP, moyennant une contrepartie sous forme d'une redevance pour l'utilisation du patrimoine national.

La richesse de ce patrimoine s'exprime sous forme d'une rente de la ressource. En fixant le niveau de la redevance, le principe recherché est d'arriver à un partage équitable de cette rente entre l'Etat et l'OGP. De cette façon, l'Etat recevra un juste retour au titre de la concession du patrimoine, et les pêcheurs auront une incitation à développer la richesse dans la pêcherie. Il est important de noter que tout partage de la rente suppose que cette rente soit d'abord générée de façon durable.

Le but recherché est de partager la rente de la ressource générée par la pêcherie entre les deux parties prenantes à hauteur de cinquante pour cent (50%) chacun, une fois tous frais de gestion courant couverts.

La modélisation bioéconomique montre que, une fois le budget de gestion déduit, la pêcherie est capable de générer une rente de la ressource annuelle de l'ordre de 4,5 milliards de CFA (€ 7 million). Toutefois, il est important de noter que la génération de cette rente demande à ce que les pêcheurs rationalisent leur effort de pêche et que le stock de crevettes se reconstitue.

Il y a donc besoin d'une période de transition avant la mise en œuvre complète de ce plan et de ces dispositions. Vu la nature de la ressource (croissance rapide, cycle de vie courte), on peut espérer que le stock puisse se reconstituer relativement rapidement. La période de transition sera donc de quatre ans.

Pendant cette période, la redevance collectée par l'Etat sera basée sur le tableau suivant :

Année de l'adoption du plan : Période de grâce ;

Première année après adoption du plan : L'OGP paie les frais de gestion ;

Deuxième année après adoption du plan : L'OGP paie les frais de gestion plus une redevance forfaitaire de £ 1 millions ;

Troisième année après adoption du plan : L'OGP paie les frais de gestion plus une redevance forfaitaire de € 2 millions.

Après cette période de transition, la redevance sera calculée comme étant 50% de la rente effectivement réalisé l'année précédente.

L'estimation de la rente effectivement réalisée nécessitera le développement et la mise à jour d'un modèle bioéconomique de la pêcherie. Un observatoire économique de la pêcherie sera créé au niveau du Ministère chargé de la coordination de la modélisation et du suivi économique de la pêcherie, notamment les prix de première vente. La validation de la modélisation se fera par une commission paritaire Ministère-OGP.

L'estimation de la rente donnera la base de partage de la richesse entre les parties prenantes. Il est important de bien noter que la rente est susceptible de fluctuer d'année en année en fonction des prix de ventes des produits et des coûts d'exploitation. D'où la nécessité d'une part de refaire l'estimation de la rente annuellement, et d'autre part de travailler en décalé pour la programmation budgétaire, afin d'éviter les mauvaises surprises conséquentes à une attente de la rente qui n'est pas au rendez-vous.

Sur la base de l'estimation pour la pêcherie dans son ensemble, l'OGP calcule le montant de la redevance payable par chacun de ses membres. L'OGP doit obligatoirement transmettre cette information au Trésor Public qui émet une notice de paiement directement aux membres.

Un membre qui ne paie pas sa part de la redevance s'expose à des sanctions déterminées par le Trésor Public qui peuvent aller jusqu'à la saisir de ses parts dans l'OGP.

3.9 Eléments éco systématiques

Plusieurs éléments éco systématiques peuvent affecter la pêcherie de crevettes profondes.

Tout d'abord, la pêcherie peut avoir un impact négatif sur d'autres espèces. La pêcherie fait des prises accessoires de poissons relativement important avec par la suite un niveau de rejet élevé.

Afin de réduire cet impact négatif de la pêcherie, l'utilisation de grilles Nordmore et de mailles carrées rigides sera obligatoire. L'utilisation de tels dispositifs peut aussi avoir des effets bénéfiques sur les coûts de production (réduction de la facture énergétique), des gains de productivité du travail et l'amélioration des conditions de travail à bord ainsi que l'amélioration de la qualité des crevettes pêchées. Tous ces éléments contribuent à l'amélioration de la rationalisation de l'exploitation sur les plans économique et social.

Les caractéristiques techniques de ces dispositifs, ainsi que d'autres dispositifs similaires ayant aussi pour but de réduire les prises accessoires et les rejets, seront fixées par arrêté. Si nécessaire, une période de transition sera mise en place pour le transfert de technologie et l'adoption de ces dispositifs par la profession.

Ensuite, d'autres pêcheries peuvent avoir un impact négatif sur la pêcherie de crevette profonde. En particulier, le comportement migratoire de l'espèce peut la rendre vulnérable à la pêcherie de la crevette côtière à certain moments.

Le plan d'aménagement de la crevette côtière tiendra compte de cette interaction. En attendant la mise en œuvre de ce plan, des mesures temporaires seront prises par arrêté. Ces mesures concerneront, entre autres, les points suivants.

- Les pêcheurs de crevettes côtières sont tenus de signaler au Ministère via la DPSP et à l'OGP toute concentration de juvéniles de crevette profonde dans leur zone d'activité. Sur conseil de l'autorité scientifique compétente, la zone concernée pourra être fermée à la pêche temporairement pour protéger les crevettes profondes.

- Des études seront menées pour évaluer si certaines zones importantes pour les juvéniles de crevettes profondes peuvent être protégés de façon permanente, soit via une fermeture à la pêche définitive, soit via une fermeture limitée à une période définie.

- L'OGP statuera sur l'intérêt pour elle de financer l'embarquement d'observateurs à bord des crevettiers côtiers afin d'assurer le respect des dispositions prises concernant les interactions de cette pêcherie avec celle de la crevette profonde. Il pourra être utile de disposer d'observateurs embarqués sur tous ou un échantillon de crevettiers côtiers tout au long de l'année ou sur la période où les crevettes profondes apparaissent en zone côtière.

3.10 Amélioration du diagramme d'exploitation de crevettes profondes

Vu la forte disparité des prix au débarquement de la crevette profonde en fonction de sa taille, une amélioration du diagramme d'exploitation pourrait sensiblement augmenter le chiffre d'affaires et donc la rente de la ressource obtenu de cette pêcherie. Une telle amélioration sera bénéfique aussi bien pour les usagers que pour le Gouvernement. Il est possible d'identifier d'ores et déjà certaines pistes à explorer.

D'abord, à l'heure actuelle, le maillage est fixé à 40 mm. Une étude de sélectivité sera menée afin de bien appréhender l'impact de différentes tailles de maille minimal. Les résultats de cette étude seront utilisés dans la modélisation bioéconomique afin d'explorer avec les parties prenantes l'impact probable d'un changement du maillage du cul de chalut dans la pêcherie.

Ensuite, l'identification des zones de concentration de juvéniles permettra aux pêcheurs d'éviter ces concentrations et de cette façon améliorer le diagramme d'exploitation vers les crevettes à plus fort prix. Bien entendu, vu le cycle de vie de la crevette, il y aura toujours des crevettes de petite taille dans les captures, donc le but n'est pas de les éliminer mais simplement de les réduire au profil de tailles plus grandes afin d'augmenter la richesse générée par l'exploitation de la ressource.

3.11 Eco-certification

Les chaînes d'hypermarchés et de supermarchés aux Etats-Unis et en Europe s'imposent de plus en plus des politiques d'achat « responsables ». Cette stratégie concerne de plus en plus les produits de la mer. Les demandes sont croissantes pour des certificationsécologiques indépendantes pour s'assurer que les produits achetés ont été capturés légalement et viennent de pêcherie qui sont bien gérées et qui sont durables. La norme du Marine Stewardship Council (MSC) domine actuellement les certifications indépendantes mais d'autres ONG s'intéressent à ce problème.

Il est à noter toutefois que les bénéfices de la certification ne se trouvent pas pour l'heure dans le prix du produit, mais plutôt dans la garantie d'un accès continu aux marchés d'exploitation lucratifs.

Afin de vérifier l'intérêt de l'éco-certification, un exercice de pré évaluation sera fait en vue d'établir les prescriptions (cahier des charges à remplir, lacunes à combler) et l'agenda pour aller vers l'éco certification. Cet exercice permettrait également à l'OGP de construire des partenariats utiles avec les ONG, en recherchant auprès d'une ou plusieurs ONG internationale (par exemple, PRCM WWF, IUCN) un appui pour la pré évaluation et éventuellement pour l'obtention d'un certificat MSC.

IV. Risques et mesures de mitigation des risques

Le plan doit faire face à un certain nombre de risques.

Dans toute pêcherie avec les quotas individuels, il existe un risque que la mortalité par pêche soit plus importante qu'indiquée par les débarquements car les pêcheurs peuvent être appelés à trier leurs captures afin de maximiser la valeur de leur quotas. En anglais cela s'appelle le problème de " highgrading ". En mettant tous les usagers dans une seule OGP, on cherche à responsabiliser les pêcheurs mais le risque reste d'un comportement de highgrading de la part de certains pêcheurs. Un tel comportement n'est pas dans leur intérêt à long terme car les dépassements de TAC influeront sur la biomasse et le respect du point de référence limite (Bmsy) nécessitera des réductions de captures dans l'avenir. Il est important que l'OGP renforce ce message. Au besoin pour les premières années un programme d'observateurs embarqués pourrait être envisagé.

En même temps, il est bien sur important d'encourager l'amélioration de la valeur des quotas par les méthodes qui n'influent pas négativement sur la biomasse, notamment en jouant sur le maillage pour améliorer la sélectivité, en évitant les endroits et les moments où les juvéniles sont dominants, en pêchant à des moments où les prix sont plus forts.

En ce qui concerne les prises accessoires dans d'autres pêcheries, des dispositions sont prises dans le plan concernant la crevette côtière qui semble être en plus forte interaction avec la pêcherie de crevette profonde. Mais il est possible que ces mesures ne suffisent pas. Et il est possible aussi que d'autres interactions existent.

Pour que la richesse de la pêcherie ressorte, il faut investir dans le stock de crevettes. Le plan prend l'hypothèse d'une période de transition de quatre ans. Vu la nature de la ressource, cette période semble être suffisante, mais ceci reste à vérifier en réalité. Si la période de récupération de la ressource s'avère être plus long, cela prendra plus de temps pour que les rentes émergent.

Un autre risque concerne un mouvement inverse de paramètre clés. Si par exemple le prix de la crevette baisse, ou le prix du carburant augmente, les rentes potentielles diminueront. Toutefois, il faut noter que les estimations retenues dans le plan sont plutôt conservatrices. Il y a besoin de bien suivre les prix, d'où la nécessité de l'observatoire de la pêcherie. Pour la question du prix du carburant, il est également intéressant d'encourager l'utilisation de méthodes de captures qui sont efficientes en terme d'utilisation d'énergie, notamment pour réduire l'empreinte carbone qui va devenir certainement un facteur important dans l'avenir. Vu l'âge relativement avancé de la flotte, et les zones de pêche éloignée, il peut être intéressant d'essayer d'imposer des normes d'efficacité énergétique dans tout remplacement de navires.

Si l'Etat cherche à extraire une partie trop importante de la rente, les incitations à améliorer, et peut être même à conserver, la pêcherie du côté des pêcheurs peuvent être sérieusement altérées et conduire à des comportements non responsables pour la durabilité à moyen et long terme.

Le plan prend comme hypothèse que les captures déclarées viennent des eaux Sénégalaises et que donc elles sont utiles pour calculer le vrai potentiel de la pêcherie. Si en réalité les captures viennent d'autres eaux, l'estimation du MSY peut être trop optimiste.

La mise en place d'une réglementation par les pays importateurs (et notamment le règlement sur la pêche illégale Non déclarée Non réglementée INN de l'UE) pose un certain risque de perte d'accès aux marchés (et non pas seulement pour cette pêcherie). En principe, l'éco-certification et la traçabilité des captures à travers le suivi des quotas individuels dans le cadre du plan d'aménagement devraient aider à minimiser ce risque. D'autre mesure seront couvertes par la mise en œuvre du plan national sur la Pêche Illégale, Non Déclarée et Non réglementée.

Il y a un point important qui a également été soulevé par le GAIPES et qui pourrait freiner la rationalisation économique et donc constituait un risque :

- La législation sociale sur le droit du travail et les conséquences sur l'emploi que pourrait avoir une rationalisation de la pêcherie (perte d'emplois, chômage technique, modification des conditions de rémunération etc. Là encore les armements en redistribuant leurs navires si cela leur est possible, ne vont-ils pas traiter aussi de la question de l'emploi ? sinon prévoir aux besoins un plan social d'accompagnement.